vendredi 30 janvier 2015

Il y a lire et lire...

Bel édito de Jean Birnbaum dans le supplément Livres du Monde du 30 janvier: Les terroristes ne savent pas lire. Hommage à la lecture multiple et ininterrompue.

Le journaliste décrit l'afflux d'achats de livres, notamment sur l'Islam, après les attentats des 7 et 9 janvier:

"Comme si les attentas avaient rendu urgent ce recours aux textes, à leur puissance d'élucidation. Comme si, surtout, les livres au pluriel constituaient le meilleur rempart face à la terreur de ceux qui se réclament d'un livre, et d'un seul....
..... (les terroristes) s'avèrent incapables d'envisager la lecture comme pratique d'interprétation, comme élan vers l'autre, comme geste de vie. Car lire, ce n'est pas vitrifier le langage, c'est le remettre en mouvement. Lire, ce n'est pas idolâtrer un texte, c'est l'ouvrir à l'infinie pluralité du sens.

Non, les terroristes ne savent pas lire, à commencer par le livre qu'ils brandissent. Puisqu'ils se réfèrent à un livre unique, parions sur la multitude des livres. Puisqu'ils prétendent détenir la vérité absolue du texte, misons sur la diversité des lectures possibles...."

jeudi 29 janvier 2015

Le dernier livre d'Abdelkader Djémaï: Histoires de cochon chez Michalon

Abdelkader Djémaï est un écrivain bien connu à Vézelay. Il y fut le premier écrivain en résidence à la Maison Jules Roy. Christian Limousin nous parle de son dernier livre, Histoires de cochons aux éditions Michalon.                     




 Cochon, mon semblable, mon frère …

            Abdelkader Djémaï reçut la révélation des éminentes vertus du porc lors d’une Saint-Cochon en Bigorre. Aussi le livre qu’il publie aujourd’hui est-il une tentative plaisante de réhabilitation de cet animal souvent décrié pour sa saleté et sa goinfrerie après avoir été suspecté par les religions du Livre (ses sabots fendus ne sont-ils pas semblables à ceux du diable ?).
            Né à Oran, Djémaï part, comme souvent, de ses souvenirs d’enfance. Ici, ils lui font souligner les ressemblances et les différences entre la fête musulmane de l’Aïd (sacrifice du mouton) et la Saint-Cochon. Puis, il s’amuse du succès de la charcuterie hallal, chante les charmes savoureux de quelques-unes des 450 spécialités charcutières de France (la grillade, le boudin, la merguez, l’andouille si chère à Rabelais), applaudit à la résurrection du porc noir de Bigorre, sauvé de la disparition, s’émerveille de la Pourcailhade, un concours où il convient d’imiter le cri du cochon dans ses différentes activités. Alors, franchouillard ce livre ? Nullement, l’auteur proposant, de sa plume alerte, un véritable tour du monde du cochon  : Chine, Barcelone, Inde, Égypte, USA, etc. On peut dire que sa vision est planétaire. Il propose également un voyage dans le temps, depuis Ulysse transformé en pourceau par Circé jusqu’aux activités de l’artiste belge contemporain Wim Delvoye élevant des cochons en Chine, les tatouant jeunes, exposant leur peau une fois morts.
            Au passage, Abdelkader Djémaï fustige le maire FN d’Hayange et les identitaires pour avoir essayé de transformer le « paisible saucisson » en « matraque idéologique » brandie contre les musulmans (ce chapitre a fait l’objet d’une publication dans la page « débats » du Monde sous le titre « Les indigestes cochonnailles du FN », dimanche 26 – lundi 27 octobre 2014). En fait, le saucisson est largement international et le cochon rose, le produit de multiples croisements.
            Cette lutte contre les idées reçues range Abdelkader Djémaï  parmi les membres du fan club du cochon, aux côtés de Jean-Claude Dreyfus, Dominique Fernandez, Jean-Pierre Coffe et Michel Pastoureau. Lui qui fut le premier écrivain en résidence à la Maison Jules Roy, cite ce mot de Jules Renard, voisin de Chitry-les-Mines : « Quel animal admirable que le cochon ! Il ne lui manque que de savoir faire lui-même son boudin. »
            Non seulement le cochon a évité à l’humanité de mourir de faim, mais c’est un animal sensible et intelligent, proche de nous par ses qualités et ses défauts. Cela n’a échappé ni à Winston Churchill (« Les chiens vous regardent avec vénération. Les chats vous toisent avec dédain. Il n’y a que les cochons qui vous considèrent comme leurs égaux. ») ni à George Orwell (cf. le rôle des cochons dans Animal Farm), d’accord pour une fois.
            Si le cochon a hérité d’autant d’insultes et de mépris, c’est en raison même de cette proximité (de bien des points de vue, d’ailleurs) avec nous. Bien sûr, les insultes persisteront (« tête de cochon », « gros lard », « boudin »), mais ne convient-il pas de voir dans le mot « cochon », « l’un des mots les plus vivants, les plus odorants et les plus charnels, du dictionnaire » ? C’est à quoi s’emploie ce livre modeste et savoureux.

Abdelkader Djémaï, Histoires de cochons, éditions Michalon, 176 pages, 15€.


                                                                                                                       Christian Limousin



samedi 24 janvier 2015

Des bienfaits de l'écriture...

Sylvain Tesson vante les bienfaits physiologiques de la lecture. Des études américaines récentes établissent l'intérêt d'une écriture quotidienne pour se garder en santé!

La bonne habitude d'écrire vingt minutes par jour prémunit du stress, de la dépression et favorise même la cicatrisation des plaies. De toutes natures, on s'en doute.

Dans Le Monde datée du 24 janvier, le pédagogue Philippe Mérieux insiste sur l'urgente nécessité à l'école de mettre la priorité sur l'accès au langage écrit:

"La priorité du primaire est un bon choix, mais j'aurais plus délibérément ciblé l'entrée dans le langage écrit. Dans un monde où l'écrit long, structuré, a tendance à diminuer, où les courriels et SMS nous inondent, l'école a le devoir de permettre aux enfants de découvrir l'écriture et le plaisir qu'elle procure. L'écrit en tant que communication différée, argumentaire construit, est structurant pour l'élève et sa réussite scolaire. Il est aussi essentiel pour le citoyen et le débat démocratique car il permet une lise à distance, la précision, la rigueur. Et puis à tous les niveaux, la priorité des priorités, c'est l'apprentissage de la pensée. Contre l'immédiateté de la pulsion consommatoire, nous devons apprendre à nos élèves ce sursis à l'acte fondateur où s'immisce la réflexion, où l'on se nourrit de la culture pour développer sa liberté."

Est-ce que seuls les élèves sont concernés?......

mardi 20 janvier 2015

Petites pépites de Sylvain Tesson: écrire pour lutter contre la désagragation

Le baroudeur-écrivain se remet d'un grave accident survenu cet été, un soir très alcoolisé, à Chamonix.
Avant la sortie de son prochain livre "Bérézina" (éditions Guérin) Sylvain Tesson est interrogé dans le Lire de février 2015.

Quelques extraits sur la lecture et l'écriture:

.......
Comment se sont déroulés ces quatre mois?

- J'ai beaucoup lu, quasiment un livre par jour. C'est finalement le seul caractère bénéfique de la convalescence....Je suis d'ailleurs persuadé que la conversation permanente des livres a une efficacité au moins aussi intense que les médicaments....

L'écriture a-t-elle changé votre façon d'appréhender le voyage?

- Absolument. Et même la vie quotidienne! Le fait de savoir que le soir je prendrai quelques notes oblige à essayer de capter, au cours du défilement de la journée, ce qui pourra faire l'objet d'un petit récit, et donc à mieux écouter ce qu'on me dit, à mieux regarder le paysage qui est autour de moi, à essayer de convertir tout ce qui m'arrive en matière. Parce que le grand processus auquel on est soumis, c'est le processus de désagrégation, de l'oubli et du tri.Prendre des notes chaque soir sur ce qui t'est arrivé dans la journée peut te permettre de lutter contre le temps qui passe en emportant tout. C'est la vertu ultime de la littérature. Peut-être qu'il restera ça au moins, de l'effroyable expérience humaine.

lundi 19 janvier 2015

Les joies de la littérature: Dany Laferrière et Michel Houellebecq

Plaisirs de lecture du week-end.

Dans un entretien lu dans la revue des bibliothèques parisiennes, "En vue", cette belle réponse de Dany Laferrière, écrivain québeco-haïtien et académicien français à la question "Quel est votre plus grand souvenir de lecture?":

"Je suis comme Borges, je m souviens d'être entré une fois dans la forêt des mots pour ne plus jamais en ressortir. La magie des premiers moments opère encore. Le fait que sans bouger je puisse circuler à mon aise à travers les siècles et dans les paysages que j'ignorais me fascine encore."

Toute la fable jubilatoire qu'est "Soumission", le dernier livre de Michel Houellebecq, est un hommage à la lecture, l'écriture (Huysmans essentiellement) et à la littérature.

Des premières pages, on retiendra notamment:

"La spécificité de la littérature, art majeur d'un Occident qui sous nos yeux se termine, n'est pourtant pas bien difficile à définir.... Seule la littérature peut vous donner cette sensation de contact avec un autre esprit humain, avec l'intégralité de cet esprit, ses faiblesses et ses grandeurs, ses limitations, ses petitesses, ses idées fixes, ses croyances; avec tout ce qui l'émeut, l'intéresse, l'excite ou lui répugne. Seule la littérature peut vous permettre d'entrer en contact avec l'esprit d'un mort, de manière plus directe, plus complète, plus profonde que ne le ferait la conversation avec un ami.....

..... lorsqu'il est question de littérature la beauté du style, la musicalité des phrases ont leur importance; la profondeur de la réflexion de l'auteur, l'originalité de ses pensées ne sont pas à dédaigner; mais un auteur c'est avant tout un être humain, présent dans ses livres, qu'il écrive très bien ou très mal en définitive importe peu, l'essentiel est qu'il écrive et qu'il soit effectivement présent dans ses livres...."

vendredi 16 janvier 2015

Ecrits du coin à Auxerre, le samedi 24 janvier de 14h à 21h

Belle initiative à signaler pour les amis de RVLE:

Les Amis du Théâtre organisent une première rencontre entre 12 auteurs qui vivent, écrivent ou sont édités dans l’Yonne, leurs lecteurs et le public, le samedi 24 janvier à partir de 14h au théâtre d’Auxerre.

> 12 auteurs, 12 lectures théâtralisées, des expositions, de la musique et bien sûr des livres pour voyager dans les univers littéraires d'écrivains de la région.

Une journée organisée par les Amis du Théâtre, avec Jean Paul Rousseau, Jean-Noël Leblanc, Jacques François Piquet, Erik Poulet-Reney, Michel Host, Joëlle Cuvilliez, Didier Cornaille, Jean Pierre Cannet, Grégoire Courtois, Bruno Poissonnier, Anaïs Sautier et Alain Kewes. 

jeudi 8 janvier 2015

Nous sommes tous Charlie


Notre petite et modeste association qui oeuvre pour l'écriture et la lecture et nécessairement la liberté d'expression qui les accompagne, ne peut que se joindre à tous ceux qui s'indignent contre le lâche attentat d'hier. Parmi les blessés, nous comptons un de nos amis, Philippe Lançon, journaliste à Libé et Charlie, qui vient souvent se reposer en Nièvre. Nous pensons à lui et à sa famille.