Claude Pujade Renaud et Alain Kewès à
Auxerre le 28 mai
Entretien
très riche à la bibliothèque d’Auxerre le samedi 28 mai entre Alain Kewès et
Claude Pujade Renaud, une de nos invités au Grand Rendez-Vous d’automne de 2016.
Claude
Pujade Renaud, ancienne professeur de danse qui aime danser avec les mots et
creuser le lien entre corps et pensée, a publié près d’une trentaine de romans,
recueils de nouvelles ou de poésie…
Ses deux
derniers livres sont, pour l’un, des nouvelles éditées chez Rhubarbe, Sans tambour ni trompette
(2015), et pour l’autre, un roman Tout
dort paisiblement sauf l’amour publié cette année chez Actes Sud,
comme la plupart de ses ouvrages.
C’est autour
de ces deux textes que s’est situé l’entretien, dont une bonne partie a porté
sur l’écriture, la lecture et la part du lecteur.
Tout dort paisiblement… , superbe
titre extrait d’une phrase de Kierkegaard dont la présence/absence illumine
tout le texte, fait le récit de ce qui survient lorsque son ancienne fiancée,
Régine Olsen, apprend la mort du penseur qu’elle a tant aimé et aime encore.
Récit à plusieurs voix, qui s’étale de 1855 à 1926, imaginaire mais fondé sur
une riche documentation et une connaissance profonde de l’œuvre du philosophe.
A travers
lui est abordé notamment ce qu’est l’écriture :
ressassement constant d’une perte, reprise permanente de ce qui advint et
qui n’est plus… Pour CPR, l’écrivain est celui qui se remémore sans cesse, et
pour lequel cette remémoration est plus intense que la vie, celui pour lequel
écrire importe plus que vivre et qui éprouve des difficultés à vivre dans le
réel. De même que ce réel est souvent plus présent dans la lecture que dans la
banalité du quotidien.
Récit,
roman, fiction, le rapport au réel est
aussi constamment posé. Le lecteur est tiraillé entre l’envie de se laisser
porter et de croire ce qui est écrit et celui d’aller vérifier ce qui est
affirmé. « Lire un livre est toujours un acte de foi » et fiction et
réel sont indémêlables….Mais rappelle Claude PR, pour Kierkegaard, le lecteur
est aussi créateur. Le lecteur reprend le texte, se le réapproprie, construit
son interprétation à partir de ce qu’il lit et avec ce qu’il est. Le livre ne
donne pas de réponse et devrait faire qu’on s’interroge après sa lecture.
Assez proche
de cette question, celle des rapports
entre le corps et l’esprit. D’autres que Kierkegaard ont éprouvé des
difficultés avec leur corps, à sentir leur corps, à habiter leur corps. Blaise
Pascal, lui aussi de santé très fragile, percevait ces mêmes sensations. Un
critique à son égard notait : « il est mort des blessures que
son esprit infligeait à son corps. »
Enfin, et
parmi bien d’autres thèmes, a été évoquée la nécessité de lire un texte à haute
voix, pour en juger le rythme, pour lui donner corps.
C’est ce qui
se produira le samedi 1 octobre et peut-être même avant, mais chut !!!
Ménageons les surprises.
GP